« J’AI ENTRAÎNÉ »… M. THURAM

Publié le 05/03/2024

Philippe Souyris, entraîneur de Marcus Thuram en U12 (et Responsable Technique du foot réduit) à l’Olympique de Neuilly, aujourd’hui Responsable de la Section féminine et entraîneur des U18 Féminines du club, évoque les années neuilléennes de l’attaquant international français de l’Inter Milan. 

> La fiche de Marcus Thuram

« Marcus est arrivé au club en U12. Il venait d’intégrer une école à Neuilly et son prof de sport, que Je connaissais, l’a aiguillé chez nous. Et sa maman l’a amené au club. On voyait qu’il avait déjà fait du foot, il avait joué en Italie, où il habitait avant. Il était déjà fou de foot, il adorait ça. Quand il est arrivé, on a fait une petite détection, comme pour tout le monde. On remarque tout de suite ses qualités au-dessus de la moyenne, bien évidemment, et on l’a donc intégré chez nous. Il avait déjà des qualités physiques et techniques supérieures à la plupart des enfants. Il maîtrisait l’intérieur du pied, avait une bonne frappe, sentait un peu le jeu. Et il était déjà plus grand que les autres. Il est arrivé dans une équipe avec pas mal de gamins qui se connaissaient, mais Marcus a un relationnel très facile, donc il s’est très bien intégré. Il est hyper sociable. Il a toujours été leader dans l’équipe, leader de groupe, toujours avec le sourire. On voyait qu’il aimait le foot, et aussi être avec les copains. Quand je le vois avec les pros, je me dis que c’est vraiment le même Marcus que celui que j’ai connu gamin : il est toujours en train de chambrer, d’enlacer les gens… On voit qu’il s’est très bien intégré à l’Inter, qu’il est apprécié par ses partenaires, en équipe de France aussi. Et c’est ce qu’il se passait déjà quand il était gamin.
J’avais déjà eu des fils de pros, Fernandez, Rocheteau, Pardo, Boli… Comme eux, Marcus a été logé à la même enseigne que les autres, c’est pour ça aussi que ça a aussi bien fonctionné avec lui et avec ses parents. Si on commence à traiter un enfant différemment, il peut commencer à prendre la grosse tête ou à avoir un comportement qui n’est pas naturel. Il faut être juste avec tout le monde pour que l’ambiance soit saine.

C’était quelqu’un qui aimait le jeu. Quand il était sur un terrain, il aimait le ballon, il aimait dribbler. Pour lui, c’était vraiment un jeu. Il fallait à la fois le laisser jouer, s’exprimer, pour qu’il développe ses qualités individuelles, mais aussi, quand les choix collectifs n’étaient pas bons, c’était bien de le prendre à part et de le lui expliquer les situations de jeu. On a beaucoup travaillé aussi sur le sens de l’effort parce que, temps en temps, quand quelque chose n’allait pas, il pouvait bouder. En étant derrière lui, il réagissait plutôt positivement. Sur ces trois années, j’ai été ravi de l’évolution de l’enfant qu’il était : il s’était très bien intégré au groupe, avait un super état d’esprit, il aimait le foot et pensait au jeu, sans penser à sa future carrière. Il a bien progressé, individuellement et collectivement. En plus, autour de lui, il y avait une bonne équipe, qui jouait au ballon, donc c’était très plaisant et intéressant. Au niveau de son poste, il était plutôt dans l’axe, parce que c’était un joueur décisif, et on alternait entre milieu et attaquant. De par ses qualités, c’était un joueur offensif parce qu’il aimait provoquer, frapper au but et marquer.

Lors d’un tournoi, je ne sais plus si c’était en demi-finale ou en finale, on va aux tirs au but et il n’a pas voulu tirer. Il a eu peur. Du coup, j’ai fait tirer quelqu’un d’autre, qui a loupé et on a perdu le match. En rentrant, dans le train, j’ai discuté avec Marcus. Je lui ai dit que c’était lui qui avait le plus de qualités dans l’équipe et que c’était à lui de prendre la responsabilité de ce tir. Je lui ai dit qu’il faudrait que ça soit son rôle à l’avenir, parce qu’il avait les qualités pour le faire. Quelques années plus tard, quand il jouait à Guingamp et qu’il est venu au Parc des Princes (en Coupe de la Ligue), il avait éliminé le PSG en transformant un pénalty à la dernière minute alors qu’il en avait raté un en début de match. J’étais fier de lui, même s’il avait éliminé mon équipe (rires).

Sans enlever le mérite de Marcus, ses parents ont joué un grand rôle dans sa réussite. Quand son papa Lilian jouait à Barcelone, il m’appelait avant et après chaque match pour faire un petit débrief. Il voulait savoir comment s’était comporté Marcus, s’il avait une bonne attitude. Quand Lilian est arrivé à Paris ensuite, il venait voir tous les matches. Il avait l’œil sur le comportement de Marcus, regardait s’il avait une attitude positive envers ses partenaires. Marcus et son frère Kephren ont été très bien aiguillés par leur père et leur mère. Sur le foot en lui-même, leur papa a fait en sorte qu’ils soient sur le bon chemin et qu’ils aient toujours une attitude positive. Je pense que c’est grâce à ça qu’aujourd’hui, ils ont une progression linéaire.

Je ne regarde jamais de foot à la télé hormis le PSG et Marcus m’a fait regarder des matches de Sochaux, Guingamp et du championnat allemand. Je le suis parce que je suis très content de ce qu’il est devenu. Je trouve qu’il dégage une belle image du foot. Tout le monde parle de lui en bien, je suis content de ça.

Pour la première sélection de Marcus en équipe de France, Lilian m’a appelé et m’a dit, avec beaucoup d’humour, « c’est à grâce à toi ça ». J’ai été tellement fier de sa première sélection, du fait qu’il soit appelé pour l’Euro 2021 et qu’il marque son tir au but face à la Suisse. Que Marcus et Kephren soient sélectionnés en équipe de France, c’est une grande fierté pour le club aussi. C’est une belle image que l’on peut renvoyer de notre formation. On est un petit club amateur, on ne joue pas à très haut niveau, mais on fait un travail sérieux. C’est un club familial et sérieux au niveau sportif. »

Par Florent PIASECKI

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