Il est tout simplement l’un des meilleurs gardiens de but du monde, titulaire et leader en Equipe de France, évoluant au Milan AC après une formation au PSG et des années au LOSC : Mike Maignan a débuté le football en Île-de-France, au FC Villiers-le-Bel. Romain Damiano, responsable de l’école de foot et de la préformation du club à l’époque, raconte ses années beauvillésoises.
> La fiche de Mike Maignan

« Mike, je l’ai vu quand il était en catégorie Poussins parce que j’étais responsable de l’école de foot à Villiers-le-Bel. Il jouait dans le champ, plutôt attaquant. Il manquait un joueur dans les buts, donc il a dépanné. Et on s’est aperçu que c’était un phénomène. Il est allé chercher des ballons avec une détente impressionnante. Il avait déjà toute la gestuelle du gardien intrinsèquement, sans travail.
Qu’il reste dans les buts, au début c’était un peu compliqué. Ensuite, on a réussi à le convaincre et, au fil du temps, il s’est installé à ce poste. Il y a cette histoire des sélections à l’INF Clairefontaine, il était pris pour le dernier tour. Il me dit alors : « J’en ai marre, je veux rejouer dans le champ ». Donc je lui dis qu’on finit Clairefontaine et qu’ensuite, je le remets dans le champ. En fait, il a été repéré par le PSG à ce moment-là et il n’a plus quitté la cage. Je l’ai quand même fait jouer quelques fois dans le champ en U15 pour lui faire plaisir. Sur ses derniers matchs à Villiers-le-Bel, je l’avais fait jouer devant, il avait marqué 4 buts.

A l’époque, on n’avait pas de spécifique gardiens mais, quand il a signé au PSG, on a trouvé un entraîneur des gardiens. Et je faisais des aller-retour le mercredi au PSG, où il faisait une séance. Mais, avant ça, ce sont vraiment ses qualités intrinsèques qui ont fait la différence. Il avait l’agilité, les réflexes, la lecture de jeu, une sacrée détente. Il était très concentré et déjà un patron qui dirigeait sa défense. Pour ce qui est des plongeons, il avait une technique déjà pas trop mal et il l’a perfectionnée. Il était grand et avait une présence.
Je ne sais pas pourquoi, un jour, j’ai dit à mon père : « J’ai le futur gardien de l’équipe de France dans mon équipe ». C’est une vision qui s’est réalisée.
On l’a développé, accompagné. Dans sa catégorie, il y avait deux autres gardiens qui étaient bons. Quand il y a trois bons gardiens, dont un phénomène, il faut mettre quelque chose en place, donc on a fait appel à un entraîneur des gardiens spécifique, Patrick Mbeu, qui était international rwandais et gardien de la réserve du PSG.
Il était déjà grand et taillé. Ce que l’on voit aujourd’hui en tant que professionnel et en tant qu’homme, c’est ce que j’ai vu durant toute sa jeunesse. Il était un peu en avance morphologiquement, carré, c’était le patron. Dans la vie de tous les jours, il est très réservé, parle peu. En revanche, dès qu’il est sur le terrain, il se transforme, c’est un vrai leader, naturel. Il a toujours été mon capitaine.
Lors d’un match à Cergy pour la montée, il avait fait une parade extraordinaire. Il est allé chercher une balle en lucarne, on ne sait pas comment il a fait. Des bourdes aussi il y en a eu (rires). Un jour, on dominait tellement une équipe qu’il en a eu marre et il est monté au milieu du terrain. On s’est fait lober et on a perdu le match, on s’est fait éliminer de la coupe comme ça.
Au PSG, je connaissais bien l’entraîneur des gardiens de but, Eric Leroy. Il m’a dit que Mike était un diamant brut, qu’il fallait le peaufiner. Au début, au PSG, c’était la découverte. Il s’est vite mis au travail et après, il a franchi les étapes une par une, pour passer à chaque fois devant les autres. Une fois que Mike a eu ses entraînements à répétition, qu’il a ajusté sa technique de gardien de but, c’était parti.
Mike avait un caractère dur, mais il a bien grandi. Au début, les bulletins scolaires n’étaient pas top, et il a fait des efforts pour faire en sorte que ça s’améliore, aussi bien sur les notes que sur le comportement. D’ailleurs, avec Pierre Reynaud et Cédric Cattenoy du PSG, on a fait une réunion pour lui mettre une « carotte ». On lui a dit qu’il avait un an pour améliorer ses résultats scolaires et son comportement et qu’il intégrerait le centre de formation. Et ça, il l’a fait avec brio. Il y a un an et demi, il est venu à Villiers-le-Bel pour récompenser les garçons qui avaient de bons résultats scolaires. Cela l’a marqué et aidé, et maintenant, il aide les autres dans ce domaine, c’est génial.
J’allais souvent le voir au PSG, je faisais le lien avec la famille. Parfois, quand il fallait lui remonter les bretelles, je le faisais. Je passais des messages différemment par rapport au coach ou à l’encadrement.

Je suis toujours son parcours avec une grande fidélité. A chaque fois qu’il y a un pépin physique ou qu’il est critiqué, je suis le premier attristé. On est tout de suite affecté, parce que c’est un gamin qu’on a vu grandir.
Aujourd’hui, je ne suis plus au club de Villiers-le-Bel mais je suis encore éducateur sur la ville et j’entends souvent des « Il a entraîné Mike ». Il est vraiment un exemple pour toute la ville, les enfants ne parlent que de lui, et d’Axel Disasi, que j’ai eu également avec la génération 98.
Quand je l’ai vu en équipe de France, j’ai eu des frissons. Cela procure des sentiments indescriptibles, c’est magique.
La génération 95, je l’ai eue 5 ans, des Benjamins jusqu’aux U15. C’est une génération exceptionnelle à Villiers-le-Bel : il y avait Mike, Grejohn Kyei (ex-Reims, Lens et Clermont, aujourd’hui à Charleroi), Kévin Farade (ex-Annecy, aujourd’hui au FC Fleury 95), Cédric Odzoumo (FC Versailles)… Vraiment une grosse génération. Et je pense que ça a été une chance pour Mike parce qu’ils se tiraient tous vers le haut. Je n’ai jamais connu de génération aussi forte par la suite. Ils vivaient, dormaient, mangeaient pour le foot. Ils finissaient l’entraînement et allaient rejouer ensemble dans les différents quartiers.

Sa famille ne s’intéressait pas trop au foot. Jusqu’à ce qu’il perce, on avait des relations parents-éducateur classiques. Et par la suite, sa maman m’a demandé si je pouvais un peu l’accompagner. C’est ce que j’ai fait, en ayant des échanges presque hebdomadaires avec sa maman et le PSG, jusqu’à ce qu’il vole de ses propres ailes. Il y avait une relation de confiance. Sa famille l’éduquait avec de très bonnes valeurs. Et, qu’il soit footballeur, musicien ou mécanicien, ça ne changeait rien pour eux. »
Romain Damiano travaille aujourd’hui avec les U19 Nationaux du FC Chambly Oise et les U6-U7 de l’US Persan. Il est également intervenant sur la section sportive féminine du collège Saint-Exupéry de Villiers-le-Bel.