S. Benmahammed : « L’arbitrage est une affaire familiale. »

Publié le 07/05/2019

Couronnée d’un titre de major de sa promotion pour l’accession à la catégorie Féminines F2, l’arbitre de 21 ans, Siham Benmahammed, dévoile son parcours et ses affinités toutes particulières avec le monde de l’arbitrage. Même si prendre le sifflet n’était pas une évidence au départ, la jeune femme a su y prendre goût au fil des saisons. 

Vous finissez major de votre promotion, était-ce que votre objectif initial ?
« Non du tout. Mon objectif initial était de passer en fédération parce que je savais qu’on n’allait pas toutes avoir ce privilège. Etre classée première c’est encore mieux mais mon objectif principal était uniquement d’accéder à l’échelon supérieur. Bien sûr je suis contente d’être major, mais je préfère prendre la dernière place qui permet de passer en fédération que d’être première et de ne pas être qualifiée. Dans tous les cas je savais que j’avais rendu de bonnes prestations. »

Quel a été votre sentiment au moment du verdict ?
« J’ai été soumise à des observations, je savais qu’elles s’étaient bien passées. Mais on n’est jamais sûre à 100% car on ne connaît pas le potentiel des concurrentes. Cela dépend un peu de tout le monde. Vous pouvez faire une bonne prestation mais il se peut que l’autre arbitre soit encore meilleure. J’ai donc été soulagée. »

Quel a été votre parcours jusqu’ici ?
« Je suis dans ma sixième saison d’arbitrage. A 14 ans j’étais joueuse à Tremblay en France et j’ai joué jusqu’à mes 16 ans. Je n’avais plus vraiment les jambes pour évoluer au niveau auquel j’aspirais. J’ai commencé à arbitrer de temps à autre. J’avais une double casquette. Je jouais au football et je prenais le sifflet. J’arbitrais les U15 le midi et je jouais à 17 heures. Puis l’arbitrage a pris le dessus, mais j’ai également gardée un pied dans le monde du foot car je suis la responsable du pôle féminin de Futsal à Drancy. »

L’arbitrage est donc presque arrivé par hasard plus que par conviction.
« Oui, même si mon père est un arbitre. Au départ il m’a persuadée de me lancer pour avoir un peu d’argent de poche. Mais à un moment donné, on m’a demandé de choisir. Du coup je me suis dirigée vers l’arbitrage. Le foot était une passion mais je savais que je n’y ferais pas carrière. Je ne pensais pas forcément avoir un avenir non plus dans le domaine de l’arbitrage, mais je me suis piquée au jeu. J’ai commencé par la catégorie U15 en district le samedi. Ensuite je suis passée en catégorie U17 le dimanche après-midi. Puis je suis montée en Ligue. je dirigeais des matchs des U15 et U17 en R2. La CRA m’a alors désignée sur des matches féminins. A l’âge de 19 ans, j’ai fini par diriger des seniors féminines et les U19 Féminines Nationaux. »

Quel est l’origine de votre intérêt pour le monde de l’arbitrage ?
« Le premier qui m’a transmis cette passion n’est autre que mon père.  Ensuite mon frère, qui est également arbitre, y est aussi pour quelque chose. Mon père a inscrit ma sœur jumelle Nora et moi-même, il y a quelques années, et ma petite sœur en septembre 2018. Donc finalement, chez nous, l’arbitrage est une affaire familiale. Au fur et à mesure de mes nominations, j’ai vraiment commencé à apprécier la fonction. Plus vous montez, plus vous dirigez de belles affiches et plus c’est passionnant ! »

Vous avez dirigé également des matches masculins en seniors dimanche après-midi. Est-ce qu’il y a des différences avec les rencontres féminines ?
« Le jeu est plus rapide chez les garçons. L’intensité est plus élevée. Mais l’ambiance dans le football féminin est plus cool. Mais c’est un football qui devient également de plus en plus compétitif. Lors des matches de D2 Féminines et des U19 NF (Nationaux Féminines) vous sentez vraiment que l’enjeu est important. L’écart entre ces deux footballs est en train de se réduire. »

Avez-vous déjà été en difficulté sur un terrain, notamment dans les rencontres masculines ?
« Jusqu’à présent non. Je touche du bois. Par contre, il est clair que certains matches ne sont pas simples, mais il suffit que vous preniez les bonnes décisions au bon moment, que vous appliquiez le règlement et la tâche devient plus aisée. On ne m’a jamais manqué de respect. Durant les premières minutes les joueurs essaient de vous tester. Si vous démontrez du caractère et que vous tenez la route il n’y aura à priori pas de problème. »

Quel a été le processus de votre candidature pour la Fédération ?
« L’année dernière, j’avais un statut de réserviste. Il s’agit des potentielles candidates, des aspirantes. Les réservistes sont présentes pour faire tourner l’effectif en cas de blessure ou d’échec au test physique des candidates à la Fédération. Par la suite, mon référent, Hugues Defrel et la CRA, m’ont annoncé que la saison suivante j’allais devenir candidate. Cette année, j’ai réussi le test physique (test TAISA 40x75m + 6 sprints de 40m), et j’ai été supervisée trois fois par des observateurs de la FFF et c’est ce qui résulte du classement (au rang) final. »

Y’a-t-il des sacrifices à faire quand on est un arbitre ?
« Je ne dirai pas des « sacrifices » parce que c’est toujours un plaisir d’aller arbitrer un match. Après il est évident qu’il faut être disponible. J’aime cette fonction et dans mon esprit je sais que mon week-end est dédié à l’arbitrage. Je suis constamment disponible, à part en cas de blessures ou d’événements majeurs. Durant ces six saisons je n’ai quasiment jamais formulé d’indisponibilités. »

Quelles sont vos ambitions futures ?
« Je ne suis pas une personne qui se prend la tête. Je ne me fixe pas forcément d’objectif. J’avance au jour le jour, au fil des matches. Je fais évidemment en sorte que les observations se déroulent de belles manières. Ensuite si ça passe bien tant mieux, si ça ne passe pas tant pis, je travaillerais davantage. Mon objectif est de rester à la Fédération et pourquoi pas monter dans quelques années en D1 Féminines. J’avance pas à pas. »  

Quelles sont les personnes qui vous ont le plus aidée, le plus soutenue ?
« Je remercierai tout d’abord ma famille. Nous sommes cinq à être présent sur les terrains le week-end. Il n’y a que ma mère qui n’y est pas. Quand j’étais mineure, mes parents m’ont beaucoup aidée. Ils me suivaient constamment. Leur présence sur mes matches me rassurait. Mon père s’occupait également des formalités administratives. S’ils n’avaient pas été là je pense que je n’aurais jamais continué dans l’arbitrage. Je voudrais aussi remercier mon référent, Hugues Defrel, car c’est en partie grâce à lui que j’en suis là. Enfin je voudrais tirer un coup de chapeau à tous les collègues arbitres que j’ai rencontré et avec qui j’ai partagé. C’est un monde dans lequel il y a beaucoup de communication et de soutien réciproque. »

Par Cyrille Legendre

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