Mustapha Sangaré, à toute vitesse

Publié le 03/11/2020

Le parcours classique d’un joueur, le centre de formation avant de devenir professionnel, semble ne plus être le seul modèle dans le football moderne. De nombreux garçons éclosent désormais sur le tard, sans être passés par la case centre de formation. Un chemin que se verrait bien prendre l’attaquant qui fait actuellement les beaux jours du Racing, meilleur buteur du National 3, Mustapha Sangaré. Portrait d’un attaquant au parcours exponentiel, commencé seulement à 15 ans.

Pour beaucoup de jeunes footballeurs, la passion pour le ballon rond vient dès le plus jeune âge. S’ensuit un cheminement des plus classiques avec le rêve ultime de devenir le nouveau Messi ou Ronaldo. Pour d’autres, cette passion vient bien plus tard, avec le talent comme accélérateur. Jeune, Mustapha Sangaré se préoccupait davantage d’une petite balle jaune plutôt que d’un grand ballon rond. Fan du sport de raquette, ce jeune issu du 12e arrondissement pratiquait le tennis en club, bien loin encore du football : « Avant, je jouais un peu au foot mais en bas de chez moi ou avec des amis de temps en temps ». C’est presque poussé par ces mêmes amis qu’il rejoindra le club de La Camillienne, toujours dans le 12e arrondissement, à seulement 15 ans. Un âge où on imagine que c’est davantage pour le loisir et le plaisir de se retrouver avec ses copains que pour le rêve d’un enfant de devenir professionnel. C’est pourtant à cet instant que l’ascension commence.

De la 4ème division au Régional 1

« Je jouais avec l’équipe réserve pour un problème de mutation. J’ai donc commencé en 4ème division ». Le néo-footballeur s’éclate pour ces débuts en club. Alors, le jeune parisien profite de ces belles années entre amis pour s’adonner à sa nouvelle passion grandissante. Pendant quatre saisons, Mustapha enchaîne les bonnes performances. Avec un prime l’attachement à un environnement qu’il ne se voyait pas quitter : « A cette époque déjà, on me répétait souvent que je pouvais jouer plus haut. J’en avais un peu conscience mais mon objectif était de prendre du plaisir. J’aurai pu quitter le club à maintes reprises mais j’étais avec mes amis. Je ne me voyais pas partir ». Bien qu’un seul essai infructueux de deux mois au Maccabi Paris Métropole soit venu entrecouper son idylle avec La Camillienne, c’est au bout de la saison 2017/2018 que le talent de ce jeune garçon devient trop imposant pour la 4ème division. Le moment était venu de changer de niveau.

Alors qu’il décide de quitter la Camillienne, Mustapha n’en restera jamais très loin. Tout au long de son parcours, le natif du 12ème arrondissement gardera une attache particulière, et surtout quotidienne, avec son quartier : « Je travaille à l’association multisports de La Camillienne et je suis prof de sport là-bas. Je donne des cours de gym. Je fais des cours d’éveil et de cirque avec des enfants ». Sans oublier que depuis 2016, il est aussi responsable de la section féminine du club. Un lien fort qu’il devra couper comme joueur, presque par nécessité. L’appel des sommets.

Et même quand il quitte le club en tant que joueur, il ne s’éclipse pas très loin de chez lui. Du 12ème il part de l’autre côté du périphérique, à Vincennes. Et là encore par le biais d’une relation : « Je connaissais bien le coach de la réserve du CO Vincennes donc il m’a proposé de venir avec lui en D1 ». A l’époque, le club avait déjà son équipe première en Régional 1, mais sa réserve (actuellement en R3) se trouvait en 1ère division « Je pensais un peu à la R1 mais le coach m’avait expliqué que ça ne serait pas possible. Mais c’était déjà énorme de passer de la D4 à la D1 ». L’écart entre ces trois divisions est déjà conséquent, mais pour rêver de monter six échelons d’un coup, il faut être très confiant. Ou talentueux.

Au bout d’un mois dans son nouveau club, Mustapha Sangaré profite de la blessure de l’attaquant de l’équipe première pour être convoqué en Coupe de France. Une opportunité à saisir qu’il ne manquera pas « Depuis ce jour-là, j’ai participé à une vingtaine de matches en R1 ». Ou comment grimper six échelons (de D4 à R1) en deux saisons. Le déclic. Le jeune attaquant commence à se rendre compte réellement de ses capacités : « Dès le match de Coupe de France, j’ai vu que j’avais du potentiel et que je pouvais me débrouiller en R1 ».

Alors qu’il était prédestiné pour la D1 à son arrivée, il se retrouve avec l’équipe première du CO Vincennes à enchaîner les matches et les buts. Il ne lui faudra que cette saison fulgurante pour attirer la convoitise du Racing, club pensionnaire du National 3. Après quatre saisons à la Camillienne. Un septième échelons gravi. Un ascension météorique. D’autant plus lorsque l’on commence le football à l’âge de 15 ans. Mais a-t-il réussi à passer ce nouveau palier aussi facilement que les premiers ?

Au défi de la National 3

De sa première année avec le Racing, Mustapha dresse un bilan contrasté : « L’année dernière a été une saison mitigée parce que je me suis fait les ligaments externes du genou. J’étais blessé pendant 3 mois. Je reviens après la trêve hivernale où j’ai joué quelques matches avant l’arrêt des championnats ». Il parviendra à marquer un seul petit but en six apparitions au poste qu’il a toujours occupé, celui d’ailier. Freiné dans sa progression, le nouveau venu ne se décourage pas et profite du confinement ainsi que de la préparation d’avant-saison du Racing pour travailler physiquement et se remettre en forme.

Autre changement pour sa deuxième saison en N3, son positionnement sur le terrain. Depuis le début de son idylle avec le foot, le Parisien a toujours joué sur un côté. Cette année son coach, Guillaume Norbert, décide de le placer à la pointe de l’attaque. Son poste préférentiel, selon le principal intéressé. Et pour le moment son attaquant le lui rend bien. Si lors du match inaugural face au Paris FC (1-2), Mustapha reste muet, il profitera de la réception du Blanc-Mesnil, la journée suivante, pour débloquer son compteur. Depuis, il ne passe plus un week-end sans marquer. Un doublé face aux Mureaux, un autre sur la pelouse de Brétigny et encore un lors de la dernière journée pour la réception du PSG. Il compte déjà 8 buts en 6 matches de championnat. Un ratio qui en fait évidemment le meilleur buteur de National 3, même s’il admet que ce n’est pas une obsession : « C’est toujours gratifiant de voir son nom en haut de la liste mais mon objectif principal c’est que l’équipe gagne. Si l’équipe gagne, logiquement je vais encore plus briller individuellement. C’est du donnant-donnant ».

Pour l’aider dans sa progression, il peut évidemment compter sur la confiance de son coach. Lors de son arrivée, Mustapha constate le recrutement ambitieux du Racing avec notamment la présence dans l’effectif de l’ancien attaquant de Ligue 2, Wilfried Louisy-Daniel. Pas de quoi le refroidir pour autant : « Quand il m’a fait venir, le discours du coach a été très clair. Si tu es bon, je te ferais jouer. J’ai senti que ce ne serait pas un coach qui fonctionnerait au statut. En plus de ça, il est proche des joueurs, c’est quelqu’un de bienveillant et je sens qu’en deux ans j’ai énormément progressé avec lui ».

Après être monté si haut en si peu de temps, ce jeune attaquant âgé de 21 ans seulement peut désormais espérer poursuivre sur sa lancée. Il a enfin pris conscience de son potentiel et peut désormais viser encore plus loin : « J’aimerais bien essayer de grimper le plus haut possible. Mon objectif, c’est de faire ma saison et de décrocher un contrat pro. Passer en trois ans de 5ème division à un contrat professionnel, ça pourrait être pas mal » sourit-il. Pour poursuivre son véritable conte de fée, Mustapha Sangaré devra toutefois enchaîner les bonnes performances en espérant que la saison ne soit pas tronquée et attirer les regards de club prestigieux même s’il dirige déjà sur lui toute la lumière de ce début de saison de National 3.

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